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Témoignage de Madame B.

Le cri d'une jeune mère

J'ai été ravagée par une maternité complexe. Où le moi d'avant s'entrechoquait avec le moi mère, le moi de maintenant.  

Ça a été très très difficile et le manque d'écoute a aggravé les choses .

J'ai compris que j'avais besoin d'être accompagnée par des professionnels bienveillants. 

J'ai donc commencé à écrire pour m'aider à fixer les choses, dans mon esprit qui se refusait à tout ce bouleversement. 

J'ai fini par écrit cette lettre, comme une sorte de Renouveau dans lequel beaucoup de jeunes mères pourraient se reconnaître. 

Je veux crier ce texte, que les esprits s'en imprègnent, qu'il soit amplifié car il est pour moi une sorte de résurrection, et j'espère qu'il le sera pour  beaucoup d'autres mamans. 

Je vous partage "mon Cri" en espérant qu'un jour il trouvera peut-être une place dans une de vos publications ou bien constituera un témoignage sur lequel d'autres pourraient s'appuyer pour ne plus se sentir seules.   

Continuez à faire ce que vous faîtes, c'est tellement important pour beaucoup d'entre nous. 

 

️ 

" Merde aux apparences.

Merde à la pression sociale et familiale consciente ou non.

Merde au besoin de la perfection inculqué dès la tendre enfance.

Merde aux tabous et non-dits.

Merde à ceux qui jugent encore et toujours. Merde à ceux qui ne comprennent rien et qui refusent de comprendre. 

Merde à ceux qui ne demandent pas si ça va ou qui osent le demander pour ensuite faire les aveugles et les sourds. 

Merde aux mensonges et cette belle et douce vie vendue comme un saint Graal, que tu auras pour sûr!

Merde à ceux qui ont eu la chance de ne pas trop morfler, qui te regardent avec mépris car tu oses tout remettre en question, poser les questions qui dérangent.

Merde à ces gens qui te répètent que tu as donné la vie, il est temps d'assumer et de prouver que tu es à la hauteur, qu'il faut y arriver sinon tu n'es pas digne de leur respect.

Merde à ceux qui m'oppressent par leurs regards inquisiteurs, ceux qui me font des réflexions sur mon état délabré, ceux qui ne voient pas pourquoi j'en fais "tout un pataquès" parce qu'ils ont réussi du premier coup EUX !

Merde à ceux qui comparent et qui me disent 

" t'as de la chance, regarde ceux qui sont pires que toi ! remercie Dieu et relève toi." 

Merde aux envieux qui ne voient que la finalité mais jamais le chemin plein d'embûches, de désillusions et de sacrifices parcouru. 

Merde à ceux que balayent ma peine et mes questions d'un revers de main accompagné 

d'un " tu en fais trop, tu n'es pas la première ni la dernière". 

Merde à ceux qui ont dit que j'ai sous-estimé l'ampleur du rôle qui m'attendait. 

Sachez, que j'étais plus que prête, mais j'ai aussi appris qu'on est jamais assez prêt.

Merde à ceux qui croient que tomber, pleurer, se plaindre et mettre à jour l'envers du décor relève de la faiblesse. 

Merde à ce schéma sacrificiel ancré et maintenu par le corps médical, l'entourage et tout ce qui s'en suit.

Merde au " ah... c'est assez rare" des médecins démunis, qui butent devant un contre exemple de leurs théories rodées. 

Merde au système qui t'oblige à chercher désespérément quelqu'un qui aura l'intelligence de faire du cas par cas, pour te donner des réponses plausibles et pouvoir enfin avancer.

Mais heureusement, dans ce tumulte de maux voraces il y a l'espoir, la bienveillance et la gratitude. 

Alors, Merci à toi qui m'écoute répéter à longueur de journée que tout m'épuise encore et toujours. 

Merci à toi, de m'aider avec ta constante motivation à dépioter bout par bout tout ce bazar pour comprendre et avancer au rythme d'un escargot. 

Merci à toi, de ne pas pointer du doigt les jours où je fais un pas en avant pour en faire deux en arrière le lendemain. 

Merci à toi, de ne pas me faire remarquer que je ne me suis pas douchée depuis 2 jours et de tout de même me dire au réveil, les cheveux en pétard : " tu es belle".

Merci à toi, qui passe des heures assis à mes côtés, sur le carrelage froid de cette salle de bain pour me raisonner, me rassurer, m'écouter quand je me sens nulle et incompétente, car pour la première fois, la vie m'a mise à genoux.  

Merci à cette barbe qui frôle mon épaule quand tu m' étreinds pour me rassurer et sécher mes larmes. 

Merci à toi, qui t'occupe au mieux de nous en t'oubliant souvent. 

Merci à toi, de distiller ta bonne humeur et tes blagues douteuses pour que j'esquisse un sourire.

Merci à toi solide moitié, de me tirer chaque jour à bout de bras, vers ce bout de monde caché, que tu as créé pour me mettre à l'abri. 

À l'abri de tous ces regards intolérants, ces mots blessants, à l'abri de mes vieux démons insoupçonnés et réveillés par le tsunami qui s'est abattu sur nous.

Merci à toi solide moitié, qui a été et sera toujours mon radeau. 

Merci de me répéter que j'ai le droit de tomber, le droit de déroger à cette perfection maintenue tout au long de ma vie...

J'ai le droit... c'est tellement bon de le savoir et surtout de le comprendre.

J'ai le droit et le devoir, selon tes mots, de penser à moi à partir de maintenant. 

Oui à ce droit. 

Oui à l'acceptation et non plus à la résignation. Oui à la tolérance et l'ouverture d'esprit.

Oui aux différences, aux contradictions et aux déviations.

Oui à la légitimité des maux sans conditions ni contraintes. 

Oui à la parole oubliée par pudeur ou crainte.

Oui aux façades de nos corps et nos esprits cabossés par la vie, les gens et les règles.

Oui au quotidien tordu, haché, broyé et émietté.

Oui à la maternité rude et belle qui remet tout en question.

Oui à la fierté d'avoir mené onze heures de travail sans anesthésie, sans un cri ni une larme.

Oui à mon petit être et à cet amour céleste que tu fais naître au fil des jours.

Oui à tes sourires édentés.

Oui à tes câlins apaisants. 

Oui à ton contact salvateur.

Oui à ton odeur qui redonne le souffle.

Oui à tes sauts d'humeur et tes pleurs.

Oui à cette sensation de force suprême quand tu virvoltes de bonheur au simple son de ma voix. 

Oui à tes petits pieds qui s'agitent d'excitation quand je m'apprête à te porter.

Oui à celle que tu me fais devenir, et la force que je suis entrain d'acquérir pour un renouveau nécessaire dont tu es l'initiatrice.

Oui à toi, fruit de mes entrailles, Oui à toi pour toujours. 

Oui au bon comme au mauvais, car c'est le mauvais qui permet de voir le bon.

Oui à l'amitié qui t'écoute.

Oui à la fraternité qui te rassure.

Oui au dialogue construit avec une minorité de spécialistes qui écoutent et donnent raison.

Oui aux liens solides dans la douleur et la difficulté.

Oui aux émotions et leur tourbillon, car la vraie force est de les accompagner dans leur envol et non pas de les opprimer.

Oui à l'embellie.

Et enfin, un grand Oui à moi. 

À moi battante, guerrière, courageuse, belle, sensible, rigolote, fière, digne, originale, indomptable, ferme, amoureuse, épouse, maman, sœur, amie et tous les autres titres et rôles que je peux endosser.

Oui à mes multitudes facettes cachées.

Oui à moi avec mes qualités et mes défauts.

Oui à mes coups et blessures.

Oui à mon moi sombre et mes démons. 

Oui au fait de me sentir à la fois entière et incomplète.

Oui à mon visage familier et si étranger.

Oui à ce corps fatigué mais faiseur de miracles. 

Oui à moi avec tout ce qui me compose et me composera.